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jeudi 7 novembre 2013

Des reporters dénonciateurs et de leurs limites


Les journalistes sont des gens merveilleux, toujours prêts à payer de leur personne pour chercher l’info. Ainsi, l’autre jour, rentrant de Vire je tombai sur l’émission de l’inénarrable Daniel Mermet. Le sujet en était Amazon. Curieusement, ce n’était pas pour en vanter les mérites. Non, l’émission était plutôt critique. Au péril de sa vie, un journaliste du Monde diplomatique s’était fait embaucher incognito comme préparateur de commandes dans un entrepôt de ladite entreprise de vente par Internet. Et qu’y découvrit-il ? Rien moins que l’enfer,  en pire ! Figurez-vous que non seulement la productivité des employés y est mesurée, mais qu’il faut que chaque employé améliore la sienne quotidiennement !  Ce qui n’a pas pour conséquence logique de réduire en permanence les effectifs (logiquement jusqu’à leur quasi-disparition) mais le départ des employés fourbus, usés, au bord de la tombe. Sans compter qu’on n’offre à ces malheureux  que des CDD en  leur faisait miroiter un éventuel CDI qui ne vient jamais ou, dans le cas rarissime où on l’obtient,  qui vous mène fourbu, usé, au bord de la tombe à démissionner au bout de quelques années. De plus les esclaves se doivent d’avoir la mentalité maison. Curieusement, l’état d’esprit CGT,  tant prisé partout ailleurs, n’y est pas recherché…

M. Amazon a donc une politique de l’emploi bien claire : il s’agit d’obtenir un turn-over maximum afin de n’avoir que des employés débutants à faible productivité. On est en droit de supposer que s’il crée des emplois c’est, comme tous les patrons, pour avoir, à terme, le plaisir de les foutre leurs titulaires à la porte (notons au passage que, bizarrement, les employés licenciés pour amuser le patron sont rarement ravis d’une décision qui les libère de l’enfer qu’ils dénonçaient naguère à grands cris).

Cette mode chez les journalistes de gauche d’aller se faire  embaucher incognito (vu qu’ils sont totalement inconnus, ça ne doit pas être trop difficile) n’est pas sans arrière-pensées : il s’agit de dénoncer les méchants capitalistes qui profitent de manière éhontée des circonstances, quelles qu’elles soient. Ces mêmes personnes qui sont pour qu’on accepte sans limites l’arrivée d’immigrés quand le chômage fait rage trouvent curieux que ces-salauds-de-patrons profitent du triste état du marché de l’emploi  pour se montrer plus exigeants vis-à-vis d’une main d’œuvre précarisée. Bonjour la logique !  Ils dévoilent à nos yeux incrédules la pénibilité du travail des gens non-qualifiés (voire de ceux dont la qualification ne mène à aucun emploi, du moins à l’intérieur du système solaire). Nous qui pensions que le travail en usine, en entrepôt ou le ménage sur les ferries était une partie de plaisir !  Comment pas la moindre coupette de champagne à l’heure de l’embauche ? Aucune limousine qui viendrait vous chercher le matin et vous ramènerait à votre vaste duplex du VIe  après une courte journée d’un travail si valorisant que, s’il n’était pas grassement payé, vous l’effectueriez pour le plaisir ?

Nos « espions » ne poussent cependant pas la témérité jusqu’à aller « enquêter » partout.  Je leur suggérerais d’aller faire quelques semaines de remplacements dans des collèges de « zone sensible », dans le 9-3, par exemple ; se faire recruter ne devrait pas être trop difficile. Ils pourraient expérimenter ce qu’est la vie d’un MA, comme il est bien rémunéré, comme il ignore la précarité, comme assurer une mission de service public auprès de charmants bambins avides de culture est gratifiant et stimulant…

Une autre suggestion : se faire embaucher chez Mermet. Si on en croit cet article, en matière de sous-paiement, d’heures supplémentaires effectuées à titre gracieux, d’humiliation et de harcèlement moral, ce brave gaucho n’a rien à envier aux négriers capitalistes qu’il dénonce à longueur d’émissions. Hélas, il y a peu de chances pour qu’il fasse écho à un article critique dédié à ses pratiques managériales. De plus, dans le cerveau de quel pigiste sourdrait l’idée de critiquer la précarité de son propre statut ? Quand on participe de manière éminente aux combats du camp du bien, on le fait sans états d’âme ni rancœurs. Ces petits journaleux devraient se voir décerné la médaille du Cocu de Combat (avec palmes).

18 commentaires:

  1. « Le journaliste ne doit pas confondre son rôle avec celui du policier. » Voilà ce qui est écrit dans la charte de déontologie. Cela signifie qu'un journaliste doit toujours se présenter ès-qualités et non sous des masques divers, ce que peut parfaitement faire le policier afin de confondre les malfrats qu'il espère arrêter.

    Bref, ce type, qui doit être tout fier de son exploit, est en réalité un journaliste failli.

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    1. Florence Aubenas, ex-otage et journaliste à Libé puis au Nouvel Obs, avec "Le Quai de Ouistreham" a mené dans d'autres lieux une enquête selon la même technique d'approche. A croire que le journaliste de gauche est volontiers aussi policier que justicier...

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  2. "[...] sans états d’âme ni rancœurs" me rappelle ce que j'ai écouté -brièvement- hier sur la Corée du Nord.

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  3. En enquêtant chez le vilain Amazon, celui ne risquait pas d'être kidnappé par de vilains tout au plus des gros bras de la C.G.T mais apparemment ils ne sont légion.

    Quelle bande de nazes!

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    1. Bonjour Grandpas ! Je ne vous vois plus chez moi....

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    2. Que se passe-t-il Impossible d'ajouter un commentaire!

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    3. monsieur Desgranges, je lis vos articles mais étant d'un naturel lymphatique, je n'ai pas toujours le courage de vous laisser un petit mot, c'est d'ailleurs pour cela que je devenu fonctionnaire.

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    4. @ Grandpas : C'est rien de le dire !

      @ Orage : Votre commentaire est paradoxal !

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  4. Pour un "intellectuel" , par ex. un jurnaliste-délateur, tout travail manuel est nécessairement pénible, et incompréhensible.

    @Didier ; dans l'article de votre comique charte, je suppose que vous avez ajouté la négation....

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    1. Il est vrai que se faire "exploiter" dans le cadre d'un travail "intellectuel est bien agréable en comparaison.

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  5. C'est nous qui sommes fourbus et usés par Daniel Mermet.

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  6. A-t-on remarqué que les entrepôts Amazon sont tous de plain-pied ? Sans doute le syndrome France-Télécom.

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    1. Votre remarque peut paraître judicieuse, mais vu que le taux de suicide est très élevé chez les agriculteurs dont les champs sont notoirement de plain-pied, je ne sais pas si l'argument tient.

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    2. Robert Marchenoir7 novembre 2013 à 22:32

      Avez-vous remarqué que tous les entrepôts sont de plain-pied ? C'est plus commode pour déplacer la marchandise.

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  7. @mamasc et Jacques Etienne: c'est Taubira qui vous a condamnés à écouter Mermet?

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    1. Non, en général je coupe le poste dès qu'il arrive. Mais l'autre jour, étant en voiture, je me suis laissé aller...

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