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mercredi 11 juin 2014

Jouer pour gagner quoi ?



On joue de plus en plus. Exceptionnellement un heureux gagnant empoche des sommes pharamineuses, alimentant ainsi les rêves de millions d’autres. Chacun s’imagine, sans vraiment y compter, millionnaire, voire même multi. Tel arrêtera de travailler, tel autre se paiera la voiture, la maison, les voyages de ses rêves, les plus altruistes feront le bonheur de leurs proches (comme si ce n’était pas auxdits proche de s’y atteler eux-mêmes)… Le gain au jeu semble à certains l’unique planche de salut, voire la clé du bonheur. Ça me laisse pantois.

Un gros paquet de pognon qui me tomberait sur la tête à l’improviste comme fiente de mouette en bord de mer me semblerait une source d’ennuis plus qu’une issue de secours donnant sur la félicité.  J’en serais d’autant plus perturbé que je ne joue jamais. Et puis il me semble que les sommes gagnées, quelles qu’elles soient, sont toujours largement insuffisantes. Il n’y a qu’à voir le sort des malheureux milliardaires : bien qu’ils possèdent des milliers de millions (généralement de manière virtuelle vu que leur fortune est évaluée en fonction du cours des actions de leur(s) société (s) lequel peut, ça s’est vu, s’effondrer), ils semblent ne jamais en avoir assez. Alors le gagnant du « My million » (appellation ridicule, soit dit en passant), avec ses mille smics, il fait un peu pitié. Une fois payées la Bentley Continental et la vaste villa, il risque fort de se retrouver incapable d’en assumer l’entretien. Tout ce qu’on peut lui souhaiter, c’est d’avoir des goûts simples, de se contenter de la nouvelle Clio avec quelques options et d’un pavillon Phénix ce qui lui éviterait une prompte faillite. Ne l’oublions jamais : l’argent est une affaire de riches !

De ce curieux vice, duquel je suis totalement exempt, j’ai pu observer les effets chez un proche. En son grand âge, mon père fut saisi par le démon du jeu. Je ne sais pas trop comment l’idée lui en est venue, mais il s’est mis à passer plusieurs soirées par semaine au casino de Perros-Guirec. Il fit au début quelques gains plus ou moins conséquents mais ensuite il laissa à cet établissement de quoi se rembourser largement. Après sa mort, rangeant les papiers, nous pûmes voir que ses petites virées lui avaient coûté un bras. Bras que sa prudence financière (Ô qu’en termes galants !) lui eût interdit de se couper pour tout autre cause, bonne ou mauvaise.  Le plus curieux était que cet homme par ailleurs roué et calculateur croyait réellement qu’il allait gagner. Comme si c’était possible. Je pense qu’il ne se posait même pas la question de savoir à quoi lui serviraient ses éventuels gains, sa  situation financière le mettant à l’abri du besoin… Son comportement me rappelait celui d’un copain anglais alcoolique qui, l’heure d’ouverture des pubs venue, se mettait fébrilement à chercher un quelconque prétexte de sortie afin de s’aller copieusement abreuver. De même, quand nous lui rendions visite, lui venait-il soudain l’envie de nous payer le restaurant : on pourrait par exemple se rendre à celui du Casino, surtout que ces braves gens lui avaient offert un apéro gratuit pour quatre personnes... Il arrivait également que cette urgence le prît après un dîner bien arrosé qu’avait précédé un copieux apéro (on est Breton ou on ne l’est pas !). Comme à la fin il ne conduisait plus, il me proposait d’aller prendre le Champagne ou le digeo au bar du Casino. Je lui conseillais d’appeler un taxi, peu anxieux que j’étais de me faire annuler le permis. Mais pour le taxi, point d’argent. Ma compagne, restée sobre se dévouait pour conduire et emmenait père, fils et simple d’esprit (sa concubine qui n’était pas une flèche partageait son penchant) faire chauffer la carte bleue. Même imbibé, ces soirées m’ennuyaient à mourir. C’était une BA…

Quand j’y repense, je me dis que, comme me l’avait si sagement affirmé une vieille Anglaise, dans la vie, il faut avoir au moins un vice. Si ces coûteux moments parvenaient à délivrer  un vieil homme malade de l’angoisse que faisait sourdre en lui la conscience de sa progressive déchéance, pourquoi s’en serait-il privé ?  Pendant qu’il pestait contre ces avares machines qui l’avaient dépouillé, quand il partait, quelques jours plus tard, avec la certitude de se refaire, vers une nouvelle défaite, il était sinon heureux, du moins distrait…

25 commentaires:

  1. "Oui, parfois la pensée la plus folle, la plus impossible en apparence, s'implante si fortement dans votre esprit qu'on finit par la croire réalisable. .. Bien plus : si cette idée est liée à un désir violent, passionné, on l'accueille finalement comme quelque chose de fatal, de nécessaire, de prédestiné, comme quelque chose qui ne peut pas ne pas arriver !"

    Le Joueur
    Dostoievski

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    1. Je ne crois pas que mon père ait atteint ce degré de folie...

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  2. Le rêve de possession est plus léger que la possession.
    Faites vos jeux ! Impair et passe.

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  3. "Dans la vie il faut avoir au moins un vice", tiens c'est vrai, ça! Comme quoi il y a beaucoup de
    sagesse chez les vieilles Anglaises. Maintenant, s'il est possible d'en trouver de moins ruineux
    que celui de M. votre père...
    Amitiés.

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    1. Oh, il ne s'est pas ruiné, disons qu'il y laissait quelques milliers d'Euro par an...

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  4. Vous êtes un sage, ô cher Jacques!
    Iil serat possible dans un casino de s'arrêter quand on a gagné, mais les joueurs ne voient pas ça comme moi.

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    1. Merci !

      C'est ce que j'aurais fait, mais je ne suis pas joueur...

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  5. Sans vis pas de maison, je sais elle était facile.

    Je joue et advienne que pourra et pourquoi pas, veaux, vaches, cochons , poules et etc....

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    1. Ni de cabane, demandez à M. Marchenoir...
      Bonne chance pour vos jeux...

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  6. Avec le prochain tirage du loto Maître Jacques pourrait quitter les brumes normandes et s'offrir une villa Ananas à St Martin.
    Il y retrouverait le tout Paris.

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    1. Ah mais je n'ai aucune envie de quitter mes brûmes et encore moins pour le soleil ! Quant au tout Paris... Restons poli !

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  7. Ananas ou Papaye. Mais pas Pamplemousse : c'est déjà pris.

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  8. Jouer quand tout est fait pour que l'on perde et gagner quelquefois donne l'illusion qu'on peut parvenir à se glisser dans une faille du destin et que peut-être -peut-être même!- on ne mourra pas.

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    1. N'étant pas adepte forcené de la longévité, je ne vois aucun intérêt à ne pas mourir...

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  9. et bien, j'avoue ! je me fais un petit loto de temps à autre et en attendant le tirage que je sais perdant de toute façon je me dis que si je gagnais....

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    1. C'est bien moins addictif que les bandits manchots mais même ça ne me dit rien vu que je n'ai besoin de rien.

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  10. J'espère que votre père n'avait pas la maladie de Parkinson car ce type de symptômes peut être lié au traitement.

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    1. Si, justement, il était parkinsonien. J'ai entendu parler de ce genre de troubles liés au traitement. D'un autre côté, ça lui faisait une sortie : rester trembler à la maison n'est pas si gai...

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    2. Il y a une jurisprudence d'un malade qui a réussit à obtenir 200 000 euros du labo GSK, mais pour lui c'est allé plus loin qu'un simple hobby dominical, puisque cela concernait également l'addiction au sexe !
      Tout ça pour dire que votre père n'était probablement pas entièrement responsable de son comportement, et qu'il ne faudrait point le juger sévèrement.

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    3. Oh mais je ne l'ai jamais jugé et encore moins sévèrement. Il faisait ce qu'il voulait de son argent, influencé ou pas par un traitement.

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  11. Le temps passe et je n'ai toujours pas trouvé mon vice. Est-ce grave ?

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    1. Oui, très. A moins que vous n'appeliez hobbies vos vices... Après tout le terme est connoté moralement...

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  12. N'étant pas joueur, mais absolument pas joueur, passe.

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